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CHUANG HSIN-I  莊馨怡

Projet artistique 2025 à OurMuseum

​conçu pour l'exposition collective

«Michelle Chen»

Entre les choses s'étend une mesure insondable,

un abîme que nul calcul ne saurait saisir.​

Le souvenir est l’instant même du geste — un processus qui engloutit toutes les paroles précédant le silence, ne laissant qu’un suspens, un élan retenu.


Dans Fragments d’un discours VIII (2025), les incisions, maintenues à leur juste place, tentent de rendre visibles ces résistances ténues de l’émotion.Les pollens déposés sur les mots dessinent des lignes de chute — lignes frontières effondrées, comme les bords d’un espace lentement foulé par les pas, qui s’affaissent et deviennent des chemins porteurs de mémoire, puis des arêtes du souvenir.

 

Dans Fragments d’un discours IX (2025), une étroite distance est préservée entre le bord du rideau et le pollen, afin d’offrir un lieu d’accueil aux émotions remontées des profondeurs de la mémoire.
Le son effleure la surface du vent, frôle les paroles tues nichées dans les plis — là, s’ouvre la possibilité du contact.Le geste créatif fait écho aux traces discrètes du quotidien — un pli, une empreinte, une infime vibration.Des indices muets qui conservent en creux une mémoire corporelle, une résonance affective.

 

Dans Être de l’absence III (2022), les fissures sur les objets familiaux se révèlent comme des empreintes de veinure du bois, à la fois traces naturelles du temps et marques de la « rétention du souvenir ». L’artiste comble ces manques laissés par l’usure avec du pollen, réparant les empreintes jusqu’à ce que chaque interstice se laisse deviner en transparence.Privées de tout repère, ces traces « racontent », oscillant entre construction et dispersion.

 

Pour l’artiste, le geste répétitif du comblement ne relève d’aucune virtuosité particulière ; il est une résonance dense, un écho insistant qui pointe sans cesse vers une absence.​​​

絮 語  09

CHUANG HSIN-I, Fragments d'un discours IX, 2025,
Pollen, tissu, fil à broder blanc, coton, papierdimension variable

Photo : ANPIS FOTO Wang Shih-Pang
Image © Miss Bench et Our Museum (Taïwan)

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Laisser une fine lisière entre le bord du rideau et le pollen, un espace où les émotions remontées des profondeurs de la mémoire trouvent refuge. Le son glisse à la surface du vent, tandis que, dans les plis, les paroles muettes frémissent, rendant le contact possible.​

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L’acte du souvenir ressemble au son d’un corps heurtant une paroi : il se propage, revient à nous, et ce n’est qu’alors que nous pouvons « entendre » l’impact. Preuve de la douleur, il marque aussi la trace d’une mémoire familiale en éveil. 


Le fil tendu est une ligne d’alerte, un vecteur de vibration. Le pollen qui s’en détache révèle le choc de la main, dans un souffle silencieux.

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Images|Le processus d’installation.

Le pollen se disperse et s’accumule sur les fils de coton.

絮 語  08

CHUANG HSIN-I, Fragments d'un discours VIII, 2025,
Pollen, cire, papier, texte ("Le Moineau Noir", p.9),
dimension variable 

Our Museum (Taïwan) © photo/ CHUANG HSINI

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Je commence toujours par une expérience tactile, concrète, de la matière. D’une certaine manière, la manière dont la matière est perçue dans l’œuvre repose aussi sur cette expérience du corps.

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Il n’y a rien de plus proche de ce que l’on appelle « mémoire » que le mouvement même du souvenir. Évanescent, ce mouvement continue pourtant de nous poignarder. Se souvenir, c’est être dans l’instant du geste — un processus qui dévore toutes les paroles d’avant le silence, ne laissant que cette suspension du non-dit.

 

J’utilise des matières fragiles — le pollen, la cire fine — pour inscrire ces gestes. Je remplis les creux gravés dans la cire avec du pollen, puis je dépose des lignes de suppression, exactement à leur place, sur des fragments de poésie. Pour révéler une certaine résistance de ces émotions.

 

Sur de fines plaques de cire, chaque entaille est tracée avec une extrême précaution — le moindre geste trop brusque pourrait les briser. Dans ces creux fragiles, le pollen est doucement déposé, comme pour réparer une blessure invisible. La matière épouse la faille, silencieusement.
Puis, sur les fragments de poésie, des lignes de suppression viennent se poser à leur juste place, pour révéler une résistance subtile et persistante de l’émotion. 

Ces états de rupture, presque immobiles, viennent à leur tour paralyser la structure du langage — mais l’on sent qu’une densité émotionnelle continue d’y vibrer, en sourdine. Face à la présence de l’absent, le vide laissé par ce qui n’est plus subsiste dans la mémoire corporelle ; il ne disparaît jamais.

Ce que je cherche à exprimer, c’est ce silence radical — un silence qui s’installe entre la perte et le deuil, et qui, dans cet entre-deux, fait sourdre une douleur discrète mais persistante.

Noté lors d’un entretien, 2022, Taiwan

缺席的存在 03

CHUANG HSIN-I,
 L'être de l'absence III, 2022,
Pollen, objet familial, dimension variable

Photo : ANPIS FOTO Wang Shih-Pang, CHUANG HsinI

Image © Miss Bench, Our Museum (Taïwan), CHUANG HsinI

Les fissures sur les objets familiaux se révèlent comme des empreintes de veinure du bois, à la fois traces naturelles du temps et marques de la « rétention du souvenir ». L’artiste comble ces manques laissés par l’usure avec du pollen, réparant les empreintes jusqu’à ce que chaque interstice se laisse deviner en transparence.

Privées de tout repère, ces traces « racontent », oscillant entre construction et dispersion. Pour l’artiste, le geste répétitif du comblement ne relève d’aucune virtuosité particulière ; il est une résonance dense, un écho insistant qui pointe sans cesse vers une absence.

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Exposition Collective

「陳美玲 Michelle Chen」

Our Museum

2025. 03. 22 - 05. 11

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Commissaire - Ileana Tu (Miss Bench)

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Organisateurs

National Culture and Arts Foundation

« Curatorial Incubator @ Museum », Our Museum
Sponsors

Spring Foundation,

Pao Tai Group, Ko Yung-Chang, Kuo Mei-Shu

museum.ntua.edu.tw

CHUANG Hsin-I
Texte publié dans le catalogue de l’exposition (p. 20)/ Ileana Tu

La mémoire peut-elle être perçue ?

A-t-elle une texture, une odeur, une douleur tangible ?

Autour du souvenir lancinant de la disparition de sa grand-mère, l’artiste engage des gestes d’une extrême délicatesse, répétés patiemment — comme pour éveiller une résonance corporelle chez le spectateur, tout en suspendant l’émergence trop brutale de l’émotion. À travers la matérialité même du geste, le souvenir intime se glisse vers un espace d’expérience partagée.

Dans l’espace d’exposition, les mots à peine lisibles, les voilages translucides, les fissures discrètes traduisent cette instabilité du souvenir — ce flou croissant qu’il prend avec le temps.
Dans Fragments d’un discours VIII, une couche de cire fine et tiède est déposée sur un extrait du texte Moineau noir. À l’aide d’une aiguille, l’artiste trace le long des mots de fines incisions, sans jamais percer complètement la cire. Ces sillons, fragiles et retenus, accueillent le pollen, qui s’y pose sans s’échapper, épousant les contours du texte.

Tout au long du processus, le corps reste tendu, maintenu dans une forme d’équilibre instable — entre excès et retenue. Le pollen, quant à lui, demeure dans une zone de transition, entre construction et dissolution.
La matérialité du souvenir est ici à l’œuvre : elle fait trembler la surface, rend perceptible l’absence, et questionne jusqu’au seuil de l’effacement.
Et peut-être que la tristesse de 「Michelle Chen (1)」, ses gestes, sa vie, ont eux aussi été contenus, au fil du temps, dans une rationalité imposée — toujours « juste ce qu’il faut » (2).

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(1)「Michelle Chen」est un personnage fictif.
(2)  L'exposition collective «Michelle Chen» prend pour ossature le texte du roman Moineau noir ; autour de lui, neuf artistes viennent constituer la chair d’un corps narratif fragmentaire, tissant ensemble réel et fiction.
Michelle Chen n’est pas un personnage unique, mais une coupe sociale incarnant un âge et un genre particuliers. Entre récits factuels et imaginaires intergénérationnels, cette figure fictive circule au sein de l’exposition entre plusieurs identités : ouvrière textile, travailleuse du sexe, femme au foyer, peintre… autant de rôles qui esquissent en creux un portrait collectif — un archétype de mère taïwanaise, pris dans les plis de l’histoire.

/ About

Face aux débats contemporains sur la "matérialité", les artistes CHUANG Hsin-I et LIN Yu-Ta envisagent leur pratique artistique, comme point d'ancrage dans les chemins de la pensée. Dans cette recherche-création, ils tentent d’élucider l’intégralité d’une matérialité , en vue d’entrevoir la possibilité palpable d’un état affectif dans le cadre de différentes expériences, comme un vecteur de la réalisation artistique.

面對當代思潮中關於「物質性」討論,藝術家莊馨怡, 古睖久古(林友達) 透過創作實踐作為思維路徑上所展開的錨點,持續地對物質性創作提出藝術實踐的可能面向。

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